L’individualisme et l’égoïsme, souvent cités comme des marqueurs de notre société, et associés à la réussite sociale, sont souvent donnés comme un modèle enviable. Celui qui réussit par lui-même, qui est indépendant, ne doit rien à personne, trouve ses ressources en lui-même, est réputé être particulièrement heureux si l’on en croit certaines représentations sociales. On nous dit dans le même temps que notre époque est particulièrement pourvoyeuse d’anxiété et de dépression et que nos contemporains sont très nombreux en quête d’équilibre, de sens à leur vie, de bonheur durable.
La psychologie positive s’est beaucoup préoccupée de ce modèle dominant et de ses aléas pour contribuer à ce qu’elle appelle une « science du bonheur ». Ce n’est pas une théorie particulière, avec des méthodes spécifiques, mais une démarche qui oriente la recherche depuis une vingtaine d’années vers le fonctionnement « optimal » de l’humain, celui dans lequel il peut s’épanouir dans la durée. Martin Seligman, psychologue américain, est l’une des figures importantes de la psychologie positive, qui s’est développée à la fin du XXe outre-Atlantique et au XXIe siècle en France. La psychologie positive élargit sans cesse son champ d’analyse, mais on peut retenir un cadre commun :
Elle s’intéresse au bien-être, au bonheur, à l’humain qui va bien au lieu d’étudier les troubles, le mal-être, les pathologies mentales.
Les émotions sont sa matière première d’analyse et d’action.
L’objectif est de comprendre quelles sont les conditions favorables (au niveau de l’individu, de ses relations et de la société dans son ensemble) pour que survienne et se maintienne l’expérience du bonheur.
Sa démarche utilise un grand nombre d’outils (imagerie cérébrale, expériences statistiques, traitement des données, etc.) pour établir des résultats que l’on peut vérifier et reproduire.
Ses résultats s’adressent à toute la population et non spécifiquement à des malades et à leurs soignants.
Parmi les apports les plus étayés de la psychologie positive, il y a la définition de l’humain comme un animal social, dépendant d’un très grand nombre d’autres humains et qui tire l’essentiel de son bien-être des relations qu’il a créées avec eux. Dans une démarche scientifique, et non idéologique ou morale, la psychologie positive montre à quel point l’individualisme et l’égoïsme sont contre-productifs. À l’inverse, les comportements altruistes, de coopération et d’entraide, alimentent le sentiment de bien-être, notamment à travers les émotions positives qu’ils créent et les relations harmonieuses qu’ils rendent possibles.
Dans une perspective évolutionniste, ces façons altruistes de se conduire avec autrui, indispensables à notre survie comme espèce, auraient été sélectionnées au fil des générations et seraient très profondément ancrées en chacun de nous.
Des émotions négatives comme la peur ou la colère, également très utiles pour la survie de nos ancêtres, gardent leur pertinence dans certains contextes. La peur par exemple nous pousse à focaliser notre attention sur l’élément menaçant, ce qui peut nous aider à y faire face (lire le livre Des stress et moi, pages 20 et 21). Et à l’inverse, un déferlement d’émotions positives, qui donne une confiance en soi excessive, peut être dangereux s’il pousse à une prise de risque inconsidérée, par exemple dans la pratique sportive.
La psychologie positive, contrairement à ce que son nom pourrait laisser croire ne désigne pas a priori comme positif tout ce qui est étiqueté ainsi, il s’agit d’analyser et de mesurer. Et il se trouve que les émotions positives sont bien supérieures aux émotions négatives pour nous faire prendre du recul et inventer. En plus de nous procurer un sentiment de bonheur, les émotions positives améliorent nos capacités cognitives, elles nous rendent plus créatifs, ouverts et optimistes.
Rébecca Shankland, psychologue et l’une des spécialistes françaises de la psychologie positive, évoque à ce sujet une expérience fameuse. Des internes en médecine avaient à faire un diagnostic et à proposer des traitements. La moitié d’entre eux recevait un petit cadeau juste avant l’exercice. Ceux qui avaient ainsi éprouvé une émotion positive de gratitude se sont révélés meilleurs que les autres pour identifier la maladie et ils ont proposé des traitements plus variés et plus adaptés. « Cela montre combien les émotions positives aident à percevoir davantage d’éléments dans son environnement, facilitent l’accès aux ressources internes comme la mémoire, ce qui améliore la capacité à s’adapter et à trouver des solutions créatives aux problèmes rencontrés », note Rébecca Shankland.
La psychologie positive et ses précieuses leçons sur les émotions et les relations sociales revêtent une signification particulièrement profonde pour nos aînés. Avec l'âge, la préservation de liens sociaux solides et d'un état d'esprit positif devient impérative pour leur bien-être global. Les relations sociales et l'acte altruiste qui peut en découler ont le pouvoir de combattre l'isolement, la mélancolie, et le déclin cognitif fréquemment associés au processus de vieillissement. Les émotions positives favorisent également une meilleure adaptation aux fluctuations de la vie quotidienne et une plus grande capacité de résilience face aux défis qui accompagnent les années avançant.
Pour s'assurer d'un accès optimal aux soins de santé essentiels, les seniors peuvent envisager une assurance santé taillée sur mesure pour leurs besoins spécifiques.
Source : Fondation APRIL, Santé, En quête d’équilibre (2018)